Évaluation des impacts

On présente dans cette fiche les méthodes d'évaluation des impacts environnementaux potentiels.

Les méthodes d'analyse d'impact permettent de relier les données d'un inventaire d'analyse du cycle de vie (ex. : des substances ou des procédés) aux dommages environnementaux qu'elles sont susceptibles de provoquer ou dont elles sont à l'origine.

Les premières méthodes étaient basées sur les volumes critiques et permettait de classer les émissions selon le milieu affecté (l'eau, l'air et le sol) en calculant, pour chaque polluant, le volume équivalent pollué jusqu'à une valeur limite. Certaines incohérences de ces méthodes (elle ne prennent pas en compte la persistance des émissions et le devenir des polluants) ont conduit à leur abandon.

En fonction du positionnement sur la chaîne reliant les causes à l'effet et selon les objectifs recherchés et l'échelle prise en compte, les méthodes de calcul des impacts sont groupées en deux catégories, respectivement :

1. Méthodes "mid-point", orientées sur les problèmes. Elles quantifient les effets globaux des substances émises ou consommées. L'impact apparaît au milieu de la chaîne de causalité. Les résultats d'inventaire ayant des effets similaires sont regroupés dans des catégories d'impact appelées catégories intermédiaires, auxquelles on associe un indicateur intermédiaire ("mid-point indicator") qui permet de comparer les flux des substances contribuant à la catégorie en cause.

2. Méthodes "end-point" (ou dommage). L'impact se trouve à la fin de la chaîne de causalité, ces méthodes permettent d'estimer les dommages potentiels qui pourraient en allouant plusieurs catégories intermédiaires à une ou plusieurs catégories de dommages. Celles–ci sont ensuite représentées par des indicateurs de dommages.

Les méthodologies employées pour l'analyse des impacts "mid-point " sont très différentes mais ces indicateurs sont précis car leur évaluation est faite au début de la chaîne de causalité, il y a donc moins d'incertitudes pour leur quantification. Parmi les impacts "mid-point" les plus courants on cite : l'effet de serre, la destruction de la couche d'ozone, l'oxydation photochimique, la toxicité, l'acidification et l'eutrophisation (voir le dossier lien boîte B2C2 pour un rappel concernant les impacts,).

Malgré l'avantage de leur précision, ces indicateurs sont moins souvent utilisés car ils ne sont pas très parlants pour un public non spécialisé.

L'illustration suivante présente un schéma général du cadre méthodologique permettant de relier les résultats d'inventaire aux catégories de dommage en passant par les catégories intermédiaires.

Les méthodes d’évaluation "mid point" (orientées problèmes)

La complexité de la chaîne reliant les causes aux effets n'est plus à souligner. On distingue, en termes d'impacts : (i) des effets primaires, dont les origines sont liées directement aux activités étudiées (ex.: l'émission de Chlorofluorocarbures CFC), et (ii) des effets secondaires, conséquences des activités (par exemple la déplétion de l'ozone stratosphérique génère une augmentation des rayons UV, ce qui cause des problèmes de santé).

Les émissions et les extractions sont pondérées au sein de chaque catégorie d'impact auxquelles elles contribuent à l'aide des facteurs de caractérisation. Il est ainsi possible d'exprimer l'importance relative des émissions (ou de l'extraction) d'une substance pour une catégorie d'impact environnemental mid-point spécifique. Les masses émises/ extraites sont multipliées par ces facteurs et sommées pour chaque catégorie d'impact afin de fournir un résultat d'impact intermédiaire (score d'impact mid-point), souvent exprimé en kilogrammes d'une substance de référence :

, avec :

• le score de caractérisation intermédiaire pour la catégorie i

• le facteur de caractérisation intermédiaire de la substance s dans la catégorie intermédiaire i

• la masse émise ou extraite de la substance s

Plusieurs méthodes d'évaluation "mid-point" existent, chacune présente des spécificités liées aux variations spatiales des paramètres tels que la distribution de la population humaine, les écosystèmes, les zones climatiques. Parmi les plus connues nous rappelons :

• EDIP (Danemark)

• IMPACT 2002+ (Suisse)

• TRACI (États-Unis) (en Anglais "Tool for the Reduction and Assessment of Chemical and Other Environmental Impacts")

• LUCAS (Canada, en cours de développement)

• CML 2001, publiée par l'institut de Sciences de l'Environnement de l'université Leiden, au Pays bas.

Les méthodes d'évaluation "end point" (orientées dommages)

Ces méthodes regroupent les impacts en fonction des résultats dans la chaîne de cause à effet, et ont l' avantage de montrer plus clairement l'impact. Ainsi, au lieu de parler d'émissions de gaz de type SACO (substances appauvrissant la couche d'ozone, comme les CFC), les catégories d'impact vont quantifier des impacts comme le dommage sur la santé humaine (cancers, cataractes).

La caractérisation des dommages permet d'évaluer la contribution des impacts mid-point à une ou plusieurs catégories de dommages sur un sujet à protéger. Jolliet et al. ont proposé de quantifier les dommages engendrés par unité des différentes substances de référence (facteurs de caractérisation des dommages) et de les multiplier par les scores d'impacts intermédiaires, ce qui donne par somme le score de caractérisation des dommages pour chaque catégorie :

avec :

• score de caractérisation de dommages pour la catégorie d

• le facteur de caractérisation de dommages reliant la catégorie intermédiaire i à la catégorie de dommages d

Par rapport aux quatre catégories considérées dans les méthodes end-point on peut obtenir les résultats suivants :

1. Les facteurs de dommages sur la santé humaine transforment les kg de substance équivalente en années de vie perdues (DALY).

2. Les dommages sur la qualité des écosystèmes permettent d'évaluer la fraction d'espèces disparues sur un m2 durant une année

3. Les unités de dommages des catégories acidification et eutrophisation aquatique ainsi que le changement climatique sont identiques aux unités de score mid-point (intermédiaires)

4. Pour les ressources, les scores intermédiaires sont transformés en MJ/unité extraite, représentant l'énergie additionnelle devant être utilisée dans le futur à cause de la baisse des quantités de minerai dans les mines

Plusieurs méthodes mid-point sont connues, une des plus utilisées étant Eco Indicator 99, qui a récemment été remplacée par la méthode ReCiPe. Ces méthodes permettent de calculer trois catégories d'impacts end-point (ou aires de protection) : la santé humaine, la qualité des écosystèmes et les ressources.

Analyse de la qualité des données d'évaluation des impacts

Pour comprendre la portée, l'incertitude et la sensibilité des résultats de l'évaluation des impacts du cycle de vie (ACVI) des techniques supplémentaires et des informations complémentaires peuvent être utilisées. Ceci permet d'identifier la présence de différences significatives et guide le processus itératif de l'ACVI. Le choix de techniques dépendent de la précision et du niveau de détail requis pour atteindre les objectifs et le champ de l'ACV.

Les techniques spécifiques d'analyse de la qualité des données et leurs objectifs sont :

• l'analyse de gravité (ex. loi de Pareto) - méthode statistique qui identifie les données ayant le plus contribué au résultat d'indicateur. Ces éléments peuvent alors faire l'objet d'investigations avec une priorité accrue pour garantir que les bonnes décisions sont prises.

• l'analyse d'incertitude - procédure permettant de déterminer l'évolution des incertitudes des données et des hypothèses dans le calcul influençant la fiabilité des résultats.

• l'analyse de sensibilité - permet de déterminer l'influence des changements dans les données et dans les choix méthodologiques sur les résultats d'évaluation des impacts (ACVI).

Compte tenu du caractère itératif de l'ACV, le résultat de l'analyse de la qualité des données peut conduire à la révision de la phase d'inventaire du cycle de vie (ICV).

O. Jolliet, M. Saadé, P. Crettaz, S. Shaked, Analyse du cycle de vie – comprendre et réaliser un écobilan, Presses Poytechniques et universitaires Romanes, 2è édition, 2010.

Jolliet O., Margni M., Charles R., Humbert S., Payet J., Rebitzer G., Rosenbaum R.,IMPACT 2002+: A New Life Cycle Impact Assessment Methodology, The Intl. Journal of Life Cycle Assessment, Vol. 8, no 6, 2003, pp. 324 – 330, http://www1.sph.umich.edu/riskcenter/jolliet/Jolliet%202003.pdf

http://fr.wikipedia.org/wiki/Analyse_du_cycle_de_vie

E. Loiseau, Les méthodes d'évaluation des impacts environnementaux liés aux usages de l'eau, Agro ParisTech – ENGREF centre de Montpellier, 2010

http://www.mst.dk/English/

http://www.sph.umich.edu/riskcenter/jolliet/impact2002+.htm

http://www.epa.gov/ORD/NRMRL/std/sab/traci/

http://cml.leiden.edu/

Handbook on impact categories "CML 2001 ", Inst. of Environmental Sciences, Leiden University, The Netherlands, http://www.leidenuniv.nl/cml/ssp/projects/lca2/index.html

ACVBAThttp://stockage.univ-valenciennes.fr/MenetACVBAT20120704/acvbat/chap03

J-L. Menet, I-C Gruescu, L'éco-conception dans le bâtiment en 37 fiches-outils, Dunod, 2014

http://www.lcia-recipe.net/

http://www.pre-sustainability.com/content/eco-indicator-99

http://www2.ademe.fr/servlet/KBaseShow?sort=-1&cid=96&m=3&catid=13201