Identification des matériaux

Les propriétés thermiques des solides

La dilatation des solides

Origine du phénomène de dilatation.

Tous les solides s'expansent sous l'effet d'une élévation de la température. Ce phénomène physique général ne souffre que quelques très rares exceptions. Cet effet de l'échauffement provient de l'augmentation de la distance moyenne interatomique due à l'agitation thermique.

On peut justifier ce fait en observant la courbe montrant l'évolution de l'énergie potentielle d'une liaison, U, (potentiel de Lennard-Jones) en fonction de la distance r qui sépare deux atomes impliqués dans une liaison. Cette courbe est la résultante de deux effets :

  • la répulsion qui s'exerce entre les orbitales externes qui sont au contact. Les forces répulsives sont très intenses et de très courte portée. L'énergie potentielle de répulsion varie en 1/rm, avec m variant de 6 à 11 suivant le type de liaison.

  • l'attraction entre les charges différentes : nuages électroniques et noyaux. Ces forces s'exercent à plus longue distance que les précédentes. L'énergie potentielle d'attraction varie en -1/ rn, avec n variant de 1 à 6.

Au voisinage de zéro K, et quelle que soit la nature de la liaison, ces courbes ont toujours la même allure et la résultante montre un minimum d'énergie potentielle, négative, lorsque les deux atomes se trouvent séparés par la distance d'équilibre de la liaison, r0.

De plus, la courbe résultante est asymétrique par rapport à la distance d'équilibre.

Si la température augmente, les atomes sont soumis à l'agitation thermique et vibrent autour de leur position moyenne. Si ΔE représente l'énergie cinétique des atomes (l'énergie thermique), les points b et c de la courbe sont les positions extrêmes d'un atome en vibration. L'asymétrie de la courbe fait que la position moyenne, a, se déplace vers la droite si la température et l'énergie cinétique augmentent : c'est à dire que la distance moyenne entre les deux atomes augmente et que le matériau se dilate.

Expérimentalement, ce fait est bien confirmé, par exemple par la mesure des paramètres de maille des systèmes cristallins en fonction de la température.

Grandeurs physiques exprimant la dilatation.

Idéalement, c'est la variation relative de volume qui caractérise l'expansion thermique d'un solide. Dans la pratique, c'est la mesure de la dilatation linéaire qui est la plus facile à réaliser et donc la donnée la plus fréquente dans la littérature technique.

Pour un échantillon de longueur initiale L0, on mesure l'allongement ΔL observé pour une variation de température ΔT. On calcule alors le coefficient de dilatation linéaire a :

en Kelvins-1

La valeur de a diffère suivant la classe à laquelle appartient un matériau, c'est à dire la nature de la liaison qui en assure la cohésion.

Les courbes de Lennard-Jones des liaisons faibles, iono-covalentes et métalliques permettent de prédire que les céramiques sont les matériaux qui se dilatent le moins, les métaux moyennement et les polymères beaucoup.

Coefficient de dilatation moyen en K-1

Valeur la plus faible

Valeur la plus élevé

Céramiques

5 10-6

Silice = 0.54 10-6

Verres = 12 10-6

Métaux

20 10-6

Tungstène = 4.5 10-6

Alcalins = 80 10-6

Polymères

80 10-6

PMMA (plexi) = 5 10-6

PE (p.éthylène) = 5 10-6

Dans la pratique, la connaissance de a est importante pour :

  • choisir des matériaux résistant aux chocs thermiques.

  • associer entre elles des pièces de nature différente et prévoir les déformations.

  • calculer des jeux fonctionnels, dans un moteur par exemple.

Si le matériau est macroscopiquement monocristallin et non cubique, on observe des coefficients a différents suivant les directions cristallographiques principales. On connaît même quelques solides qui présentent des dilatations négatives suivant une direction (graphite, plutonium), tout en montrant au total une expansion volumique positive quand T augmente.

Si le matériau est polycristallin et isotrope, le coefficient a est unique et ne dépend pas de l'orientation. On a alors

Il est, par contre, fréquent d'observer des matériaux possédant une orientation préférentielle des grains multiples qui les constituent (métaux laminés, matériaux composites, solidification dirigée, etc..). La dilatation est alors elle-même anisotrope et requiert la détermination de a suivant plusieurs directions.

La capacité thermique

Sous l'effet d'un apport de chaleur dH, la température d'une mole de matériau augmente de dT.

Pour les solides, on définit le plus souvent ce phénomène à pression constante par une grandeur caractéristique, appelée capacité calorifique ou capacité calorifique Cp :

Cette grandeur est nulle à T = 0 Kelvin.

A haute température, la loi de Dulong et Petit, provenant de la théorie de l'agitation thermique, montre que tous les solides doivent acquérir une capacité calorifique égale à Cp = 3R par mole (R :constante des gaz parfaits), soit 25 J/mole/K.

Mais cette loi est une approximation et la capacité Cp évolue de 0 à 3R selon la courbe suivante

On définit également une seconde caractéristique, TD température de Debye, au-delà de laquelle on admet que l'approximation de Dulong et Petit devient applicable.

La température TD est d'autant plus élevée que la température de fusion du solide est haute. Ainsi, pour les matériaux réfractaires fondant à très haute température, Cp est inférieure à 3R.

Voici les valeurs de Cp et TD à 25°C pour quelques éléments.

Élément

TD

CF

Élément

TD

CF

Li

Be

B

C(diam.)

Na

Mg

Al

Si

Ti

Cr

Fe

Ni

Cu

400

1000

1250

1860

150

318

394

625

400

460

420

375

315

20.7

21.8

19.3

13.3

28

24.6

24.3

24.7

25.1

23.7

22.2

25.7

24.5

Zn

Ge

Zr

Mo

Ag

Cd

W

Pt

Au

Hg

Pb

Bi

Th

234

360

250

380

215

120

310

230

170

100

88

120

100

25.4

26.0

28.9

23.7

23.8

25.9

25.0

25.9

25.2

27.2

25.6

25.5

26.3

Attention : de nombreux résultats techniques sont exprimés en J/kg/K.

En effet, il est fréquent d'apprécier le stockage d'énergie pour un volume ou une masse fixés.

Les résultats sont alors quelque peu différents...

La conductibilité thermique

Il s'agit ici de l'un des trois modes de transmission de la chaleur, le plus important dans les solides : la conduction (les autres sont la convection et le rayonnement).

La perception sensitive de cette propriété peut se faire en touchant à température ambiante un morceau de cuivre puis une pièce de bois. Le premier procure une impression de froid car la très grande conductibilité thermique du cuivre abaisse la température de la peau. Quant au bois, beaucoup plus « isolant », sa température superficielle s'adapte très vite à celle de la peau et l'échange de chaleur se fait à travers un gradient thermique notable.

Les applications de cette propriété sont industriellement très importantes. Elles permettent de définir, par exemple, des matériaux isolants pour réaliser des bâtiments dont les pertes d'énergie sont minimales ou bien encore ceux qui serviront à construire des échangeurs de chaleur efficaces.

Aspects macroscopiques de la conduction thermique.

S'il existe une différence de température aux extrémités d'un conducteur, il s'établit un flux de chaleur Q, analogue à un courant électrique sous l'effet d'une différence de potentiel.

La première loi de Fourier décrit ce phénomène (elle ne s'applique qu'aux matériaux isotropes).

Elle permet de définir K, le coefficient de conductibilité thermique du matériau, qui relie le flux de chaleur Q, en W/m2, au gradient de température :

Le coefficient K est exprimé en W/m/K.

Cette première loi, dite « en condition stationnaire », est complétée par une seconde pour des conditions dynamiques (où la température varie). Il s'agit d'une équation aux dérivées partielles dont l'interprétation et la mise en œuvre sortent du cadre de cet exposé.

La conductibilité thermique k(Wm-1K-1) des métaux est entre 10 puissance 2 et 10 puissance 3, pour les céramiques elle dépassent les 10 puissance 3 et pour le polymères elle est environ à 7.
Conductibilité thermiqueInformationsInformations[3]

On voit ci-dessus comment varie la conductibilité thermique à température ambiante, selon les trois classes de matériaux.

On peut observer de grandes analogies entre la conduction thermique et électrique : la plupart des métaux qui sont de très bons conducteurs électriques sont simultanément d'excellents conducteurs thermiques. Mais il existe quelques belles exceptions. Ainsi, l'isolant électrique idéal qu'est le diamant est meilleur conducteur thermique que l'argent !

Remarquons aussi que K varie seulement sur 4 ordres de grandeur selon les différents matériaux à l'état massif (infiniment moins que dans le cas de la conduction électrique). On gagne trois ordres de grandeur si on introduit les matériaux allégés (fibres, mousse, poudres).

Les mécanismes de la conduction thermique.

La chaleur se propage dans un solide par l'agitation thermique qui affecte :

  • les électrons libres. On parle alors de conductibilité thermique électronique, caractérisée par un coefficient Ke.

  • le réseau cristallin sous l'effet des « phonons » qui sont des ondes de propagation de l'agitation thermique d'un atome à l'autre par l'intermédiaire des liaisons. Il s'agit dans ce cas de la conductibilité thermique de réseau, avec la constante Kr.

Les deux phénomènes s'ajoutent et on peut donc écrire : K = Ke + Kr

En général, pour un matériau donné, l'un des deux termes est prépondérant et l'on peut classer les matériaux en conducteurs thermiques « par les électrons », comme c'est le cas des métaux et en conducteurs thermiques « par les liaisons (le réseau) » qui est plutôt le cas des céramiques et des polymères qui possèdent peu ou pas d'électrons libres. Cette conduction peut s'avérer très efficace puisque le carbone graphite est presque aussi bon conducteur thermique que l'aluminium.

Le meilleur cas pour la diffusion rapide de l'agitation thermique (conduction thermique élevée) est celui des matériaux cristallins qui possèdent un ordre parfait à très grande distance.

La conduction thermique sera donc diminuée dans les alliages. Les éléments d'addition, situés de place en place dans les sites du réseau cristallin, se comportent comme des centres de diffusion qui freinent les électrons libres aussi bien que les phonons en introduisant des discontinuités dans l'assemblage atomique.

De même, les matériaux cristallisés à grain très fin sont moins bons conducteurs qu'une version monocristalline.

Enfin, les matériaux amorphes sont de moins bons conducteurs que les matériaux cristallisés car ils ne possèdent pas d'ordre à grande distance.

L'effet de la température sur la conduction thermique.

En partant des basses températures, la conduction thermique de tous les matériaux augmente avec la température du fait de l'augmentation de l'amplitude de l'agitation thermique, aussi bien celle des électrons que celle des atomes du réseau.

Au-delà d'une température critique, la conduction tend ensuite à décroître car le libre parcours moyen des électrons (et des phonons) diminue.

  1. Jean-Yves DAUPHIN Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage des Conditions Initiales à l'Identique

  2. Jean-Yves DAUPHIN Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage des Conditions Initiales à l'Identique

  3. Jean-Yves DAUPHIN Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage des Conditions Initiales à l'Identique

  4. Jean-Yves DAUPHIN Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage des Conditions Initiales à l'Identique

PrécédentPrécédentSuivantSuivant
AccueilAccueilImprimerImprimerRéalisé avec Scenari (nouvelle fenêtre)